Thèmes du peintre
Tout au long de sa carrière, les thèmes de prédilection d’Auguste Durst ont été les paysages champêtres et pittoresques, avec une nette préférence pour les paysages normands, les paysans et les animaux de ferme qui ont été sa vraie source d’inspiration. Fidèle à sa formation classique, il réalise également de nombreux portraits. Les sujets traités par le peintre sont l’expression de sa mobilité, orientée naturellement vers la Normandie, l’Angleterre et l’Ile de Jersey où s’il s’exile pendant la Commune, mais les villes de l’ouest parisien retiennent aussi son attention. Ces voyages l’amènent vers des contrées plus lointaines, en Gironde, où sa soeur s’est mariée et installée; vers Marseille et la campagne près de Toulon dans le Var. Les paysages, la lumière et les couleurs qu’il y rencontre, les gens de ces régions, leurs modes de vie, reviennent de manière récurrente dans toute sa production.
LA NORMANDIE
Bien qu’ayant reçu une formation en atelier, Durst fait partie de cette génération d’artistes qui travaillait en plein air, même si de nombreux tableaux sont repris en atelier. Hormis les très grandes toiles (réalisées pour le coup en atelier, le format standard qu’il utilise pendant sa carrière nous laisse penser qu’il peint sur le motif. La Normandie offre un cadre de vie et des scènes bucoliques recherchées par beaucoup de parisiens et d’artistes, qui fuient es nuisances industrielles et urbanistes naissantes à Paris et en banlieue. Les scènes peintes sont ainsi paisibles et familiales. Elles montrent les cadres et les conditions de vie sans mièvrerie, ni fards. Ce sont des représentations naturalistes par excellence sans trop d’idéalisation.
Pour autant, il réussit à faire ressentir la fraîcheur de l’herbe, la lumière du ciel et jusqu’à la température, en l’immergeant dans une nature prise sur le vif. L’artiste arrive à communiquer le plaisir d’une promenade bucolique. Les personnages deviennent anecdotiques, prétextes à des jeux de gammes chromatiques. Les toiles se distinguent par la poésie des lieux autant que par la justesse de l’exécution. Souvent une ciel travaillé, une fenêtre de bleu dans une végétation dense lui permettent d’ouvrir l’horizon, à la manière classique. Tout semble alors s’harmoniser dans un concert de couleurs et de lumière. Derrière les vues de fermes normandes ou autres paysages pittoresques montrant la vie rurale ou urbaine, se dévoilent surtout des problématiques plasticiennes, où il est surtout question de couleurs et de lumière, d’agencement et d’équilibre des espaces. Ainsi on voit émerger des séries chromatiques: des vertes, de grises, de brunes. Il use des monochromes ou de camaïeux colorés pour créer des harmonies subtiles.
Les portraits
Comme beaucoup de peintres de son époque, Auguste Durst s’adonne aussi au portrait. Les deux maîtres qui l’ont formé - Hébert et Bonnat - en sont les grands représentants “académiques” de la seconde moitié du XIXe siècle et début du XXe siècle. Qu’il soit masculin, féminin ou de jeunes enfants, l’artiste traite le portrait de manière classique, sur des fonds bruns, bouchés surtout en début de carrière. On connaît de lui très peu de portraits masculins. Ce sont surtout des portraits de femmes qu’il exécute. Peu à peu, il les intègre dans des fonds ouverts, en pleine nature.
Les paysages dE GIRONDE
Le peintre a commencé à fréquenter la Gironde et l’Aquitaine autour des années 1885. Le mariage de sa sœur Hélène avec un médecin bordelais, le docteur Mauguin, et l’installation de celle-ci dans cette région semblent être à l’origine de ses fréquents séjours dans le bordelais. Dès lors, il participe régulièrement aux salons des amis des arts à Pau et à Bordeaux. C’est d’ailleurs à Pau, lors du Salon de la société des Amis des Art, que son tableau Matinée de Printemps qui avait fait sensation l’année précédente s’affirme comme une toile de première qualité et soulève l’enthousiasme du public. La ville de Pau achète cette oeuvre grâce au don d’un mécène, M. Loubidos.
Les paysages retenus par l’artiste se situent dans le Sud-Est de la Gironde, du côté de la Porte de la Benauge, des coteaux des Graves, puis descendent vers les bords de Garonne et s’enfoncent dans l’Entre-Deux-Mers. Les fermes, les moulins typiques de la région, les paysages vallonés de vignes et de forêts de chênes et châtaigniers autour de villages comme Arbis, Escoussans, Podensac, Gonac font son bonheur. Les sujets traités par Durst rendent compte des particularités de cette campagne girondine : une terre plus calcaire, des espèces d’arbres différentes, et une lumière moins blanche qu’en Normandie.
Les paysages d’ANGLETERRE ET dU SUD
Comme nous l’avons dit, Auguste Durst a dû s’exiler en Angleterre entre 1870 et 1872. Installé à Londres, puis à Jersey, celui-ci remporte à son retour en France de nombreuses images de ces paysages tourmentés et ténébreux. On ne sait pas vraiment s’il y peint sur place et en plein air. L’artiste a dû réaliser de nombreux croquis, notamment sur des carnets, qu’il utilisa à différents moments de sa carrière. À la lecture des catalogues de salon, il s’avère que l’artiste réalise pas moins d’une dizaine d’oeuvres avec ce paysage maritime. Ce qui l’intéresse ici c’est plus la puissance de la mer, les conditions météorologiques - à l’image de l’oeuvre Phare de Jersey, réalisé en 1886 - , que le caractère pittoresque de l’architecture ou des villages anglais. Au cours de sa carrière, le peintre a peint un certain de nombre de toiles avec pour sujet l’arrière pays marseillais, les coteaux de Toulon et du Var ou encore les vallées de Lozère. A sa famille du coté de sa mère étant originaire d’Aix-en-Provence, on imagine aisément que l’artiste dut rendre visite à certains membres de sa famille, et en profiter lors de longs séjours pour peindre la campagne avoisinante. Par ailleurs, l’épouse de son frère Marius, Marie Jouve, est elle originaire de Chanac, en Lozère. Plusieurs oeuvres DE 4auguste Durst sont des paysages de Lozère. L’artiste a ainsi probablement séjourné à plusieurs reprises dans cette branche familiale.
Ainsi des oeuvres dites méditerranéennes sont présentées dès 1892, puis en 1905, dans les différents salons auxquels il participe.
Les Nus
En cette seconde moitié du XIXe siècle, les principaux genres de la peinture française sont toujours le portrait, le paysage, la nature morte et le nu. On qualifie souvent Auguste Durst de peintre de paysages, peuplés de dindons, d’oies, canards, etc. Mais force est de constater lorsqu’on se penche sur l’ensemble de sa production, que les nus sont abondamment présents. Son modèle se prénomme “Fanflette”. La référence originelle à la mythologie est totalement secondaire. Durst se plaît à y dévoiler l'intimité féminine. Les poses y sont variées. On la retrouve peinte dans des grands formats, debout au milieu d’un décor végétal, allongée au bord d’une rivière, perchée sur un arbre, assise dans un fauteuil ou faisant sa toilette en pleine nature ou dans une ferme en Normandie. Ainsi sans artifices, ses représentations de corps féminins traduisent davantage des d'anatomie féminine que de grand style.
La ville
Dès la seconde moitié du XIXe siècle, Paris, les banlieues et l’Ile-de-France subissent une forte vague d’industrialisation et d’urbanisation qui modifie visiblement le regard des peintres qu’il porte sur la Capitale. Ainsi un paysage urbain d’un nouveau genre voit le jour, marqué par des vues d’usines et d’habitations, de nouveaux aménagements urbains. A plusieurs reprises, Durst explore ce type de représentations, notamment à travers des vues nocturnes des rues de Paris qui lui permettent de traduire des atmosphères inquiétantes. “Les mystères de Paris” d’Eugène Sue ne sont pas loin dans l’esprit. Un autre sujet revient très régulièrement dans l’oeuvre du peintre : les inondations. C’est un sujet à la mode dès le milieu du XIXe siècle. En effet, d’importantes crues de la Seine et la Loire, qui débordent de leur lit pas moins de treize fois, traumatisent les populations. Et comme beaucoup d’autres peintres, Durst représente aussi de nombreuses inondations. Au-delà du caractère anecdotique des sujets, les paysages d’inondations ou de neige sont l’occasion pour l’artiste de jouer sur des nuances de gris, de camaïeux brun, alors que les paysages printaniers de Normandie lui permettent de faire exploser de subtilités nuances de verts contrastées par quelques taches colorés de rouge ou orangé.